Test Live a Live : retour à la vie d'un classique du J-RPG grâce à un remake réussi !
16 20
Il aura donc fallu 28 ans avant que Live a Live ne daigne visiter nos contrées européennes. Ouf, on a failli attendre… Heureusement, notre patience est récompensée par la qualité et l'habileté du remake qui nous est proposé aujourd'hui. Le style HD-2D réussit en effet l'exploit de moderniser les graphismes tout en conservant leur aspect rétro. Le résultat parlera donc autant aux jeunes générations qu'aux vieux de la vieille. Au delà de la question graphique, cette nouvelle version reste parfaitement fidèle à l'ancienne sur le fond, quitte à se montrer un peu rudimentaire sur certains aspects. Il faut donc faire avec quelques problèmes de rythme et d'équilibrage, mais l'expérience a au moins le mérite d'être authentique. Si vous cherchiez un bon petit RPG à l'ancienne pour vous occuper une vingtaine d'heures cet été, vous l'avez trouvé !
- Le traitement HD-2D est parfait pour un remake de ce type
- Plusieurs héros, époques, gameplay… c'est varié !
- De très chouettes musiques, adaptées aux différents univers
- Un radar utile pour ne pas trop se perdre
- Les voix japonaises ou anglaises, au choix
- Des problèmes de rythme et d'équilibrage made in 1994
- Spammer les mêmes attaques est un peu trop efficace
- L'infiltration dans le chapitre japonais est ratée
- Les combats de la Chine impériale sont répétitifs
Sorti en 1994 sur Super NES (ou plus exactement Super Famicom), Live a Live n'était disponible à l'époque qu'au Japon, ce qui a d'ailleurs contribué à le rendre plus ou moins culte par chez nous. Depuis, de l'eau a coulé sous les ponts et c'est évidemment un remake, et non un simple portage, qui nous arrive aujourd'hui sur Switch. Nous allons voir que le jeu conserve de nombreuses qualités ainsi que quelques défauts d'époque, et que le passage à la moulinette HD-2D s'avère particulièrement intéressant, y compris pour l'avenir.
Si l'évocation du scénario est généralement un passage obligé pour l'analyse d'un RPG, il serait assez difficile de suivre cette tradition ici puisque Live A Live est constitué de sept petites aventures indépendantes. Du moins, en apparence. Car après fois bouclé ces chapitres aux héros et époques temporelles uniques, deux nouvelles sections jouables faisant le lien entre les divers éléments se débloquent. Puisqu'il est impossible d'aborder ce point sans spoiler, nous nous contenterons de vous dire que l'ensemble ne manque pas d'intérêt et que les choses ne sont pas forcément aussi manichéennes et décousues qu'elles en ont l'air de prime abord. En ce qui concerne le gameplay, le point commun entre les différents chapitres réside dans les affrontements. Nous avons affaire à un J-RPG de 1994, et il s'agit donc d'un système de combats au tour par tour. Mais celui-ci a la particularité de faire l'impasse sur la gestion de mana, le temps faisant office de "ressource" principale. Concrètement, chaque héros ou ennemi possède une jauge de charge qui détermine qui attaque quand. Les sorts les plus puissants demandent évidemment plus de temps de préparation, tandis que se déplacer d'une case sur le terrain quadrillé fait aussitôt augmenter la jauge de tous les autres personnages. Ce point est d'autant plus important que les zones d'effet diffèrent totalement d'une attaque à l'autre (case unique, diagonale, rectangle "plein" centré sur le combattant, rectangle "creux", motif géométrique biscornu, etc.). En tant que joueur, il faut donc peser en permanence le pour et le contre, entre se déplacer pour optimiser nos attaques, se déplacer pour éviter les coups des ennemis, ou rester sur place pour ne pas accélérer la charge des jauges adverses. Ce système fort plaisant pâtit tout de même d'un équilibrage approximatif, qui permet de se sortir de la plupart des situations en spammant sans cesse la même action. Une option "retenir le curseur" est d'ailleurs disponible pour que le choix précédent soit automatiquement présélectionné au tour suivant. Heureusement, la grande variété des époques vient largement compenser cet aspect, qui autrement aurait pu se révéler un peu trop lassant.
ÉPOQUES ÉPIQUES
Si nous ne piperons mot sur les deux chapitres finaux à débloquer, les sept premiers sont la Préhistoire, la Chine Impériale, la Fin du Japon d'Edo, le Far West, le Présent, le Futur proche et le Futur lointain. Si nous les avons classés ici par ordre chronologique, sachez que vous pouvez les parcourir dans l'ordre que vous souhaitez. Ils sont tous librement accessibles depuis un menu circulaire, et aucun ne vient spoiler un autre. Cette liberté est bienvenue, mais c'est surtout la variété des situations et des environnements qui constitue la qualité majeure de l'aventure. D'autant plus que les développeurs ne se sont pas contentés de simplement changer les lieux, les héros et les époques. Chaque chapitre dispose de son propre rythme, et souvent d'un petit "twist" de gameplay. A la préhistoire par exemple, des icônes viennent remplacer les lignes de dialogue, les descriptions des objets utilisent un langage volontairement sommaire, et les attaques s'intitulent "Fé dodo", "Pé kipu" ou encore "Lans' caca". Le héros chasseur peut quant à lui utiliser son odorat pour faire apparaître dans les décors des petits nuages de poussière, qu'il doit ensuite suivre pour tomber sur un combat aléatoire (qui ne l'est plus tant que ça du coup). Le chapitre de la Chine impériale est plus classique, un peu trop même puisqu'il se concentre sur l'entraînement de trois disciples par un vieux maître chinois, ce qui donne lieu à des combats répétitifs. Passons.
D'autant plus que les développeurs ne se sont pas contentés de simplement changer les lieux, les héros et les époques. Chaque chapitre dispose de son propre rythme, et souvent d'un petit "twist" de gameplay.
La Fin du Japon d'Edo est une aventure nettement plus singulière car elle introduit une mécanique d'infiltration ainsi qu'un château labyrinthique rempli de pièges et de passages secrets. Le shinobi que l'on incarne peut devenir invisible à volonté, histoire d'éviter certains combats si il le souhaite. Si l'intention est louable, le fonctionnement et l'équilibrage de cette fonctionnalité laissent à désirer. Il faut attendre de bien trop longues secondes pour que les gardes passent, tandis que l'absence de prise d'expérience rend certains combats ultérieurs extrêmement difficiles. Notre conseil : tuez donc tout le monde ! Le Far West bénéficie d'une sympathique ambiance cinématographique et nous demande de dénicher des objets dans les décors, puis de les donner à certains habitants afin qu'ils déposent des pièges pour survivre à une attaque finale. Le Présent prend la forme d'une simple succession de combats qui parodie les jeux de baston (y compris dans le menu de sélection des adversaires), tandis que notre héros ne peut apprendre de nouvelles attaques qu'en les subissant une première fois. Court, mais bien marrant. Le Futur proche a droit lui aussi à une très chouette présentation, grâce notamment à un générique qui parodie les séries de types Goldorak. De plus, le perso que l'on contrôle a la possibilité de lire dans les esprits des PNJ qu'il interroge. Enfin, le Futur lointain propose une ambiance à mi-chemin entre Alien et 2001, l'Odyssée de l'espace. Extrêmement narratif, ce chapitre n'impose aucun affrontement en dehors du boss final. Une borne d'arcade facultative et fictive ("Captain Square") est tout de même disponible pour retrouver le système de combats du jeu durant quelques minutes.
PLUS VIVANT QUE JAMAIS
La variété des situations, qui fait clairement la spécificité de Live A Live, nous est donc parvenue intacte depuis l'année 1994. Quelques défauts également, il faut bien l'avouer. Qu'il s'agisse de l'équilibrage des combats (il faut parfois "grinder") ou du manque de clarté de certains objectifs, on sent bien que l'aventure date du siècle dernier. Un radar indiquant la direction du prochain lieu d'intérêt est tout de même disponible. Il est réellement bienvenu, même s'il n'empêche pas toujours de se perdre (notamment dans le chapitre La Fin du Japon d'Edo). Par ailleurs ce remake a le bon goût de nous proposer à la fois des voix japonaises et des voix anglaises, tandis que les textes français bénéficient d'une traduction de qualité. Mais évidemment, c'est la refonte graphique qui reste la vedette du show. Square Enix a choisi d’utiliser le traitement HD-2D déjà aperçu dans Octopath Traveler et Triangle Strategy. Si ce système mélangeant personnages en 2D pixelisée et décors en 3D était déjà fort appréciable dans ces deux titres, il se révèle ici particulièrement pertinent. Les effets d'éclairages et les mouvements de caméras apportent la touche de modernité nécessaire, tandis que l'aspect rétro rappelle l'aventure d'antan. Contrairement à une refonte 3D totale, le jeu reste fidèle à nos souvenirs d'époque et laisse intacte la part d'imagination propre à chaque joueur, qui peut ainsi "compléter" mentalement le manque de détails des sprites comme il l'entend. Voilà qui évite de se retrouver avec des personnages 3D magnifiques mais qui ne correspondent pas à l'idée qu'on s'en faisait. Sur ce point la réussite est telle qu'il apparaît comme une évidence que cette technique HD-2D sera réutilisée par l'éditeur pour d'autres remakes dans le futur. Seul Dragon Quest III HD-2D Remake a été annoncé pour le moment, mais d'autres suivront certainement. On se prend d'ailleurs à rêver d'une compilation HD-2D des six premiers épisodes de Final Fantasy… Terminons toutefois par une dernière note positive concernant Live A Live : les musiques sont toujours agréables à l'oreille, et judicieusement adaptées au contexte historique de chaque chapitre !