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Les histoires d'amour finissent mal, en général. Hélas, celle entamée avec la saga Command & Conquer en 1995 ne déroge pas à la règle. Cet ultime épisode a au moins le mérite de ne pas s'endormir sur ses lauriers et de tenter une nouvelle approche de la stratégie temps réel. Mais, à trop vouloir simplifier les choses, les développeurs semblent s'être perdus en route et nous proposent au final un produit beaucoup plus orienté vers l'action que vers la stratégie. Aux choix de gameplay pas toujours pertinents il faut ajouter un niveau de finition inférieur à celui des épisodes précédents. Si certains fans risquent de crier à la trahison, nous nous contenterons de parler de déception. Pas complètement désagréable à parcourir mais jamais enthousiasmante, cette conclusion de saga laisse un arrière-goût amer.
- La progression sous forme d'XP
- Jouable en coop
- Scénario "final"
- Fluide sur les configs moyennes
- Des vidéos de bonne qualité technique
- Accessible aux novices de la stratégie
- Obligation de jouer en ligne
- Aucun bâtiment à construire
- Pas de vraie récolte de ressources
- Pas d'unités maritimes
- Pas d'extra-terrestres
- Interface sans finesse
Si le nouveau Command & Conquer n'est officiellement que le quatrième épisode de la saga, il constitue en réalité le dernier rejeton d'une famille extrêmement nombreuse. En effet, si l'on tient compte des multiples extensions ainsi que des déclinaisons Alerte Rouge et Generals, l'arbre généalogique de ce RTS mythique possède vraiment plus d'une branche à son tronc. Mais il ne saurait croître indéfiniment et Le Crépuscule du Tiberium nous est donc présenté comme le volet ultime, celui qui apportera le dénouement d'un scénario entamé il y a quinze ans. La promesse est-elle tenue ? Oui, mais...
La cinématique d'introduction nous donne une première preuve que ce Command & Conquer 4 n'est pas tout à fait comme les autres, puisqu'elle nous montre Kane, le chef historique de la confrérie du NOD, proposer une alliance au GDI. Ce rapprochement inattendu ne bouleverse pas l'architecture du jeu, qui s'articule de manière classique en deux campagnes, respectivement dédiées à l'une et l'autre des deux factions. On peut d'ailleurs s'étonner de l'absence criante des Scrins, la race extra-terrestre apparue dans Command & Conquer 3. Ils jouent un certain rôle dans le scénario mais jamais le joueur n'a le plaisir de les affronter ni de les contrôler, contrairement à ce qu'on pouvait espérer. Au final, les unités du GDI affrontent celles du NOD (dirigées par le séparatiste Gideon) et réciproquement. Ce manque d'audace concerne également les graphismes, générés par un moteur 3D qui commence à prendre de la bouteille. Coloré et dynamique, le résultat reste très acceptable, mais il ne faut pas s'attendre à en prendre plein les yeux. En tout cas, pas plus qu'à la sortie du troisième épisode en 2007. On retrouve d'ailleurs le même problème qu'il y a trois ans en ce qui concerne le zoom arrière, trop limité pour pouvoir offrir une véritable vue d'ensemble du terrain. En revanche, en ce qui concerne le système de protection anti-piratage, l'innovation est au rendez-vous puisque, à l'instar du DRM appliqué récemment par Ubisoft sur Assassin's Creed II et Silent Hunter 5, Command & Conquer 4 oblige le joueur à se connecter à un serveur Internet, y compris pour entamer une partie solo. Cette nouveauté ne fera certainement pas que des heureux, même si elle se voit en partie justifiée par l'apparition d'un profil de joueur permanent. En effet, au fil des missions solo et des affrontements multijoueurs, le commandant que l'on incarne gagne des points d'expérience et prend du galon, débloquant ainsi de nouvelles unités et compétences. Un système opportuniste qui tente d'appliquer la recette Modern Warfare au genre RTS, dans le but manifeste d'obtenir le même succès. Il est encore trop tôt pour se prononcer sur ce dernier point, mais il faut reconnaître que ce système de carotte fonctionne plutôt bien puisqu'il incite forcément le joueur à toujours faire une partie de plus, afin d'atteindre le niveau suivant.
La stratégie pour les nuls
Mais la plus grosse révolution provient de la refonte totale du gameplay, tellement extrême qu'elle en détruit même les fondations de la stratégie temps réel. Ainsi, le Tiberium n'a plus qu'un rôle symbolique puisqu'il n'y a pour ainsi dire plus aucune phase de récolte de ressources ! Terminées les exploitations de gisements, il faut se contenter de quelques cristaux uniques (quatre ou cinq par map) à ramasser manuellement avec n'importe quelle unité de passage et à ramener à la "base" (nous verrons que les guillemets ont leur importance) pour obtenir un malheureux point d'upgrade. Malgré la réapparition régulière des cristaux, il est impossible d'automatiser la tâche. On se contente donc d'en ramasser deux ou trois à chaque partie afin de débloquer les technologies les plus importantes, puis on les oublie. Il faut dire aussi que les unités ne coûtent désormais plus rien. La seule limitation est celle du nombre de points de commandement. Une fois cette limite atteinte, on ne peut plus engager aucun soldat ou véhicule supplémentaire. Mais dès que l'on perd une unité, un clic suffit pour en créer une nouvelle. L'aspect économique n'est pas le seul à être passé à la trappe puisqu'il n'est plus question non plus de construire des bâtiments de productions. La "base" (avec des guillemets, donc) se limite à une seule unité géante : le Crawler. Ce véhicule mobile de septième génération ne peut être installé qu'en certains points précis de la map, que l'on peut capturer pour étendre les possibilités de déploiement et limiter celles de l'ennemi. Sa perte n'est même pas synonyme de défaite puisqu'on peut en appeler plusieurs dans une même partie (mais jamais deux en même temps). On se voit d'ailleurs parfois obligé de suicider son Crawler afin d'en invoquer un autre, mieux adapté à la situation en cours. Il existe en effet trois types de Crawler : l'offensif qui donne accès aux unités les plus puissantes, le défensif qui privilégie les unités de soin et permet de construire tourelles et bunkers, et le MCV de support qui autorise l'utilisation de pouvoirs de zone (réparation, affaiblissement, renforcement...). Les développeurs semblent penser que les joueurs modernes ne sont plus capables de gérer plusieurs aspects de gameplay à la fois. D'ailleurs, on remarquera que la campagne solo du GDI peut se boucler en mode normal sans jamais réellement faire preuve de réflexion. La méthode consistant à commander le Crawler offensif, à créer deux unités de chaque type et à les envoyer nettoyer chaque objectif l'un après l'autre suffit à sortir vainqueur à chaque fois. Seule la campagne du NOD (plus courte car amputée des trois missions de didacticiel) nous demande en de rares occasions de gérer plusieurs fronts à la fois. Les amateurs d'action qui ne veulent pas se prendre la tête apprécieront. Les vrais stratèges resteront nettement plus perplexes.
Mais la plus grosse révolution provient de la refonte totale du gameplay, tellement extrême qu'elle en détruit même les fondations de la stratégie temps réel. Ainsi, le Tiberium n'a plus qu'un rôle symbolique puisqu'il n'y a pour ainsi dire plus aucune phase de récolte de ressources !"
On connaissait déjà le genre action RPG, Command & Conquer 4 : Le Crépuscule du Tiberium inaugure donc en quelque sorte l'action RTS. Ainsi, la plupart des maps abritent quelques carcasses d'unités surpuissantes. Il suffit d'envoyer un ingénieur en prendre possession pour prendre outrageusement l'avantage, puisque cette unité s'ajoute au quota autorisé (on peut ainsi se retrouver avec un joli 74/50 points de commandement). Pour aller de pair avec ces simplifications de gameplay, l'interface a subi une "consolisation" importante alors même que le jeu n'est prévu que sur PC pour le moment. Grosse police de caractères, icônes flashy, annonces de déblocage de succès en plein milieu de l'écran : tout cela manque quelque peu de finesse. On en viendrait même à se demander si cet épisode a vraiment été réalisé par l'équipe de développement habituelle. Généralement, les Command & Conquer bénéficient d'une finition parfaite et se voient peaufinés à l'extrême, jusque dans les menus de sélection. Command & Conquer : Alerte Rouge 3 est par exemple un modèle du genre. Ici, les menus sont quelconques et nous avons été occasionnellement confrontés à quelques bugs d'I.A. (unités restant immobiles alors qu'on tire dessus), des problèmes de pathfinding (unités n'arrivant pas à trouver leur chemin) et plusieurs plantages. Rien de rédhibitoire ni de systématique mais cela prouve une certaine négligence. Même les fameuses cinématiques en vidéo paraissent moins réussies qu'à l'accoutumée. Si elles sont toujours satisfaisantes grâce à leur rendu haute définition et au jeu des acteurs, elles se déroulent la plupart du temps dans des décors trop sombres et peu variés. Au final, cet épisode se destine clairement plus aux adeptes du jeu en ligne qu'aux joueurs solo. D'ailleurs il a le bon goût de proposer un mode coopératif, facilité par la présence du lobby qui permet de trouver facilement des partenaires. De quoi retrouver un peu le sourire !